Festival de Marseille 2017

Jan Goossens, directeur du Festival de Marseille, présente le programme de la XXème édition : danse, musique, théâtre avec une grande attention à la création et à la diversité artistique

A.P. Pour la deuxième année, vous dirigez le Festival de Marseille ; auparavant, vous étiez Directeur du Théâtre Royal Flamand de Bruxelles. Quelles ont été les raisons de ce changement et quelles différences trouvez-vous aujourd’hui avec votre précédente mission ?

J.G. A Bruxelles, je conduisais une institution fascinante mais, après quinze ans, j’avais envie de nouveaux défis et j’avais besoin d’un changement pour repartir à zéro même si je savais qu’il pouvait s’agir d’une épreuve dure et difficile. Mes choix s’orientaient non pas vers une grande maison mais plutôt vers un festival. Ma décision de prendre la direction du Festival de Marseille s’est passé très vite à partir du moment que j’ai reçu la proposition. J’avais ainsi la possibilité de travailler dans un contexte urbain qui pouvait m’offrir de nouvelles possibilités d’enrichissement et en plus dans une ville que je connaissais, avec un projet culturel vivant.

A.P. Quels sont les points forts de cette édition ?

J.G. Plusieurs. Nous avons privilégié la création ; je citerais par exemple, Inoah de Bruno Beltao qui nous livre une vision personnelle de la danse hip hop urbaine.

D’autres points forts sont les focus Marseille et Subsaharienne. Le premier veut donner écho aux artistes qui ont développé leur travail en mettant en avant le territoire marseillais qui s’est transformé à l’occasion en matière de création. En fait, il s’agit d’ancrer cette manifestation dans sa propre ville pour créer des liens plus forts avec la population. Les 17 lieux qui accueilleront les spectacles en question sont la preuve de cette présence forte.  Feront partie de ce focus José Vidal qui sera présent avec Rito de Primavera (première française), une pièce pour 40 danseurs pour la plus part marseillais ; Nacera Belaza avec La Procession & Solo(s), création in situ ; le collectif Rimini Protokoll avec le projet 100%  Marseille qui voit la participation de citoyens marseillais et qui livre un portrait inédit de cette ville ouverte sur la Méditerranée ; le très prometteur metteur en scène de théâtre français Julien Gosselin avec la création 1993 qui aborde le thème de l’immigration et de la problématique des réfugiés ;  ou bien encore George Appaix, chorégraphe marseillais qui nous invite à réfléchir sur notre pensée avec sa création What do you think ?.

Le Focus Subsaharienne dédié aux artistes africains est une vraie nouveauté, résultat d’une exceptionnelle coopération avec la nouvelle équipe du Festival d’Avignon. J’étais en contact depuis longtemps avec les artistes et ce qui m‘intéressait était de pouvoir donner une image différente de l’Afrique, continent qui est aujourd’hui encore vu comme terre de pauvreté et de guerre et qui, au contraire, se révèle riche d’énergie et de vitalité. Les propositions chorégraphiques-musicales de Serge Aimé Coulibaly, de Brett Bailey, ou bien encore de Boyzie Cekwana qui dénonce les montées populistes comme formes de déni de la démocratie, sont des exemples remarquables. Le public aura la possibilité d’assister avec un seul pass aux spectacles programmés dans les deux villes.

A.P. En tant que Directeur d’un festival interdisciplinaire, quelles valeurs sociales ou politiques attribuez- vous à cette manifestation ?

J.G. Je crois que les pratiques artistiques jouent un rôle de contribution important à la création d’un contexte social et d’un espace ouvert partagé, concept qui est aujourd’hui de plus en plus mis en péril. Il est fondamental  de créer des opportunités pour que les citoyens puissent se rencontrer, échanger et être à l’écoute de l’autre. C’est pour cette raison que je mets l’accent sur la présence active des marseillais dans ce festival qui peut avoir une valeur sociale et politique allant au-delà de celle simplement artistique.

A.P. Avez-vous eu des difficultés budgétaires pour l’organisation de cette édition ?

J.G. Je dois avouer que nous n’avons pas eu de grandes difficultés,  grâce à nos partenaires : la ville de Marseille qui reste le principal, la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, le Ministère de la Culture et de la Communication, la Direction des Affaires Culturelles et le Conseil Départemental des Bouches- du -Rhône. Donner de plus en plus place à la dimension de la création implique aussi l’emploi de moyens plus importants et en conséquence devoir faire face à plus de contraintes. J’espère que dans les prochaines années les forces politiques pourront se mobiliser encore plus.

A.P.Quelles autres formes de coopération envisagez-vous avec les autres festivals de la région, par exemple Montpellier ?

J.G. Il n’y a pas d’automatisme. Cette année nous avons ouvert les portes à la collaboration avec le Festival d’Avignon. L’année passée, nous avons collaboré avec le Festival d’Aix en Provence. Les raisons sous-jacentes à ces coopérations sont seulement artistiques ;  nous travaillons dans une logique d’ouverture et d’échange permanent donc d’autres formes de partenariat ne sont pas exclues pour le futur.

A.P. De quel type de message souhaite-vous que ce festival soit porteur ?

J.G. Cette ville, Marseille, et à plus large échelle ce monde que nous habitons, nous appartiennent et c’est à nous de les partager avec l’autre. Les artistes avec leurs propositions diverses nous offrent des billets pour voyager loin avec l’esprit et nous donnent des pistes pour construire des ponts parmi les peuples et des espaces partagés vitaux.

Propos recueillis par Antonella Poli

 

 

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