Festival Le Temps d’aimer:La chambre d’amour de Thierry Malandain

Chorégraphie : Thierry Malandain

Distribution : CCN Malandain Ballet Biarritz

Une photo du filage de la pièce LA CHAMBRE D'AMOUR par le MALANDAIN BALLET BIARRITZ, première pièce créée pour le CENTRE CHOREGRAPHIQUE NATIONAL pour son arrivée à BIARRITZ en 2000 par le chorégraphe THIERRY MALANDAIN, prise à BIARRITZ le 2 septembre 2025. Danse contemporaine et néoclassique. Photographie de Stéphane Bellocq. A photo of the rehearsal of the piece LA CHAMBRE D'AMOUR by MALANDAIN BALLET BIARRITZ, first piece created for the CENTRE CHOREGRAPHIQUE NATIONAL for his venue in 2000 by choreographer THIERRY MALANDAIN, taken in BIARRITZ on the 2nd september 2025. Neoclassical and contemporary dance. Photography by Stephane Bellocq.

La 35è édition du Festival Le Temps d’aimer à Biarritz s’est ouverte le 5 septembre dernier avec la re-création de Thierry Malandain, La chambre d’amour, interprétée par le CCN Malandain Biarritz. Cette pièce, créée en 2000, fut la première présentée à Biarritz après la création du CCN Ballet Biarritz dirigé par le chorégraphe.

Accompagnée par une partition symphonique originale du compositeur Peio Çabalette, interprétée par l’Orchestre Régional Bayonne Côte Basque sous la direction de Xavier Delette avec Marina Pacowski au piano, le ballet s’inspire de la légende basque de la Chambre d’amour qui raconte le destin tragique de deux jeunes amants, Ura et Ederra (eau et beauté en basque), engloutis par l’océan alors que leur passion amoureuse était au sommet.

Le lieu suggestif et l’histoire d’amour ouvrent l’imaginaire de Thierry Malandain à des images bibliques pour évoquer le premier couple de l’humanité, Adam et Eve ainsi que la lutte fratricide entre Caïn et Abel. Le flux de ses sentiments l’amène à rendre hommage à d’autres couples célèbres de la mythologie et de la littérature touchés par des tragédies amoureuse. Sur scène, se succèdent aussi Othello et Desdémone, Roméo et Juliette, Didone et Enée et Orphée et Eurydice.

Pour Thierry Malandain, il ne s’agit pas seulement de raconter les fins malheureuses de ces protagonistes. La pièce se révèle être plutôt un hymne universel à l’amour, sublimé par le dernier tableau lumineux de la pièce. Au début, la procession des danseurs réunis comme dans un cortège funèbre, avec sur le fond de la scène une image de l’océan en noir et blanc, nous fait entrer dans l’atmosphère du ballet.

Contrairement à d’autres œuvres précédentes du chorégraphe, où les mouvements dansés dégageaient une certaine quête de spiritualité, Chambre d’amour révèle une grande humanité, saisissable grâce à un langage néoclassique linéaire et harmonieux qui parle directement au public.

ph.Stéphane Bellocq

Les différents duos se succèdent sur scène, intercalés de scènes chorales qui permettent d’ouvrir un espace de réflexion sur le tableau précédent. Elles créent le lien entre le passé et le présent, entre les histoires singulières des amants morts et nos vies. La passion est rendue sur scène de manière directe mais délicate, ce qui permet d’être traversé par les sentiments et les émotions que les interprètes sont capables d’exprimer.

ph.Stéphane Bellocq

La danse de Thierry Malandain, toujours rigoureuse et prégnante, ne manque pas au rendez-vous. La musique mérite une attention particulière : la sensibilité musicale bien connue du chorégraphe se confronte à une partition abstraite, rythmiquement difficile à suivre et marquée par des accents orchestraux originaux. Par moments hypnotisante, son uniformité fait ressortir davantage l’harmonie et l’intensité de la chorégraphie aux tons sombres. Les aspects narratifs se marient à une atmosphère intime qui reste constante tout au long de la pièce et qui s’accentue dans les parties dansées en groupe.

C’est cette fluctuation entre les scènes de duos évocatrices de mythes et les ensembles bien construits qui rend intéressante la structure de ce ballet, dont on découvre de nouvelles qualités toutes les fois qu’on peut le revoir. Derrière le désarroi des fins tragiques apparaît toute la force et la fragilité de l’amour, que Thierry Malandain fait émerger avec la profondeur qui caractérise ses œuvres depuis quarante ans.

Biarritz, Gare du Midi, 5 septembre 2025

Antonella Poli

Partager
Site internet créé par : Adveris