Giselle ouvre la saison de ballet 2025/2026 de l’Opéra national de Paris

Chorégraphie : Marius Petipa

Distribution : Les étoiles, les premiers danseurs et le Corps de Ballet de l'Opéra de Paris

Musiques : Adolphe Adam

La saison de ballet 2025-2026 de l’Opéra national de Paris s’est ouverte avec Giselle.

Ballet intemporel créé en 1841 par Jean Coralli et Jules Perrot, sur le livret du jeune Théophile Gautier, avec la complicité du dramaturge Jules-Henri Vernoy de Saint-Georges et la musique d’Adolphe Adam, Giselle représente le sommet du ballet romantique, avec toutes les facettes qui l’identifient : la tragédie d’amour, l’attirance vers le surnaturel et l’irrationnel, représentée sur scène par des créatures éthérées, incarnées dans ce ballet par les Wilis. Les thèmes gothiques y sont présents, tirés du récit d’Heinrich Heine qui, dans l’un de ses poèmes, parle de fiancées mortes, d’esprits qui ressuscitent dans la mémoire des vivants.

La version présentée à l’Opéra Garnier est celle de Marius Petipa (1887), reprise et réadaptée par Patrice Bart et Eugène Polyakov.  

L’interprétation des étoiles Léonore Baulac (Giselle) et Marc Moreau (Albrecht) nous a fascinés par leurs qualités expressives et techniques. Giselle est véritablement la jeune fille paysanne, un peu naïve : elle cède aux avances d’un jeune seigneur déjà fiancé et elle en tombe amoureuse, malgré sa liaison avec un jeune du village, Hilarion (Jérémy-Loup Quer). Ils vivent leur histoire d’amour de manière spontanée, fraîche, grâce aussi à l’interprétation de Marc Moreau (Albrecht), très sensible et capable de transmettre des attentions délicates envers Giselle. Pourtant le thème de la musique, avec des sonorités affligées, laisse présager la trahison…     

Léonore Baulac est très lyrique dès sa première apparition : extrêmement fragile, elle se livre inconsciemment à son destin. Elle se transfigure de manière naturelle, émeut en montrant sa faiblesse dans la célèbre scène de sa folie, qui clôt le premier acte. Quant à Marc Moreau, chacun de ses gestes apparaissait sincère et dévoué, on ne pouvait soupçonner sa traitrise, à l’origine du délire mortel de Giselle.

Léonore Baulac et Mac Moreau-ph.Maria Helena Buckley

Dans le premier acte on retrouve avec plaisir le sujet Bianca Scudamore qui a dépassé d’un point de vue technique son partenaire Nicola Di Vico dans les pas de deux des jeunes paysans, parfois désaxés dans les pirouettes.

Bianca Scudamore et Nicola Di Vico-ph.Maria Helena Buckley

Le deuxième acte se déroule de nuit, dans le paysage fantastique du Royaume des Wilis. Immatérielle et spirituelle, la chorégraphie présente comme élément prédominant et emblématique la figure de l’arabesque, qui trouve son apothéose dans la scène où toutes les danseuses du Corps de Ballet traversent le plateau, se croisent en dessinant des lignes infinies. Dans cet acte, la figure de Giselle, désormais esprit, ressuscité hors de sa tombe, apparaît dans tout son être évanescent, en apesanteur et donc non soumise aux lois de la gravité, libre de se laisser aller encore dans les derniers instants, dans les bras du prince Albrecht. Léonore Baulac incarne à merveille la spiritualité de son personnage et son partenaire lui offre toute sa tendresse.

Ils touchent par leur harmonie, le regret et le pardon donné par Giselle. Les deux amants peuvent profiter de danser encore ensemble, grâce à l’accord de Myrtha, la reine des Wilis, interprétée par Héloïse Bourdon. La première danseuse a humanisé le personnage de Myrtha, en lui donnant une allure moins autoritaire que d’habitude mais plutôt en partageant les mêmes sentiments liés au destin des autres Wilis.

Dans le final, lorsque Albrecht exprime tout son désarroi de devoir quitter Giselle sous les ordres de Myrtha, sur le crescendo de la sublime musique d’Adolphe Adam, Marc Moreau s’élève au ciel avec la série d’entrechats six, symbole de sa désespération. L’aube arrive et Giselle doit réintégrer sa tombe laissant Albrecht dans la désolation. 

Aujourd’hui, autant que par le passé, Giselle continue de nous toucher : sa chorégraphie, jusqu’au moindre geste, est essentielle et se transforme en un langage de l’âme.

 « Je ne connais pas d’autre ballet où la danse donne si parfaitement l’illusion d’une narration dramatique. La danse n’y est pas un exercice de virtuosité acrobatique, elle est expressive : l’action se traduit de la sorte uniquement par des moyens dansants et acquiert une force, une intensité d’émotion rarement égalées », écrivait Serge Lifar en 1942.

La soirée du 2 octobre 2025 s’est ouverte avec le majestueux défilé du Ballet de l’Opéra de Paris et des élèves de l’Ecole de danse, un moment qui honore la tradition de la danse française et encourage les jeunes générations qui peuvent défiler sur la scène du Palais Garnier avec toutes leurs appréhensions, en côtoyant les étoiles.

Le Junior Ballet, créé à la brillante initiative du Directeur du Ballet de l’Opéra José Martinez, a présenté Requiem for a rose de la chorégraphe Annabelle Lopez Ochoa, une pièce qui a réussi à marier l’esprit contemporain avec le style néoclassique grâce aux jeunes danseuses et danseurs sur scène.

Junior Ballet-ph.Maria Helena Buckley

Giselle continue jusqu’à 31 octobre avec des distributions différentes qui seront toujours capables de nous faire revivre les émotions de ce ballet qui ne vieillit pas.

Opéra Garnier, 2 octobre 2025

Antonella Poli

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