Ballet de l’Opéra national de Paris : Notre-Dame de Paris de Roland Petit
Chorégraphie : Roland Petit

Amandine Albisson et Hugo Marchand, Notre-Dame de Paris-ph.Jonathan Kellerman
L’Opéra national de Paris rend hommage à la réouverture de la cathédrale de Notre-Dame de Paris en mettant en scène l’un des ballets de Roland Petit des plus littéraires, tiré du roman éponyme de Victor Hugo.
Chorégraphe éclectique, mais toujours soucieux de représenter théâtralement les sujets de ses œuvres, Roland Petit choisit le célèbre ouvrage de l’écrivain français par hasard.
Nous sommes en 1965 lorsque Georges Auric, administrateur général de l’Opéra de Paris, commande un ballet pour la compagnie pour la première fois. Il s’agit alors pour Petit d’une mission importante compte tenu du potentiel de la compagnie et du fait que travailler pour l’Opéra lui donnera l’occasion de revenir dans le lieu où il avait grandi en tant qu’artiste et qu’il avait quitté vingt ans auparavant.
Au départ, Roland Petit avait choisi comme source d’inspiration le roman de Matthew Lewis, The Monk, publié en 1796 ; il raconte l’histoire d’un moine espagnol échappant à l’Inquisition grâce à un pacte avec le diable qui, en réalité, le trahit et le condamne à mort.
Roland Petit hésite, il avait déjà traité des sujets où le diable était présent, Mephisto Valse (1945), La Fiancée du Diable (1945) et Les Belles Damnées (1955), mais jamais la figure d’un moine.
Comme souvent, le hasard vient à son secours. Lors d’une promenade le long de la Seine, le regard du chorégraphe tombe sur Notre Dame de Paris, exposé par un des bouquinistes installés en surplomb du fleuve. Les hésitations disparaissent, l’intrigue de ce roman aux teintes sombres et sinistres de la fin du Moyen Âge, époque marquée par la tyrannie de l’Eglise, inspire merveilleusement Roland Petit.
Il choisit de collaborer avec René Allio, qui signe le décor très stylisé évoquant Notre-Dame, choix dicté par sa collaboration dans le passé avec Yves Saint Laurent, en charge des costumes.
Dans son ballet, il y a quatre protagonistes principaux : Quasimodo, devenu célèbre sous le nom de « le bossu de Notre-Dame » en raison de son apparence physique difforme et effrayante due à une gibbosité ; la belle et séduisante Esmeralda, proie des désirs refoulés de l’archevêque Frollo, et le capitaine Phoebus, victime de la présomption et des ambitions du prélat qui voulait posséder la jeune fille.
Dans les rôles respectifs de cette reprise qui revient sur les scènes de l’Opéra Bastille jusqu’au 31 décembre, nous retrouvons les étoiles Hugo Marchand (Quasimodo) et Amandine Albisson (Esmeralda) avec les premiers danseurs Pablo Legasa (Frollo) et Antonio Conforti (Phoebus).

Amandine Albisson, Notre-Dame de Paris-ph.Jonathan Kellerman
La silhouette de Hugo Marchand se transforme en la figure déformée du « bossu », métamorphose difficile à tenir d’un point de vue physique pour toute la durée du ballet. Ses qualités expressives font de lui un excellent partenaire pour la belle Esmeralda, elle découvrira les qualités humaines et sentimentales lors qu’il la sauve de sa condamnation à mort.

Amandine Albisson et Hugo Marchand, Notre-Dame de Paris-ph.Jonathan Kellerman
La chorégraphie est construite sur un langage très carré et linéaire qui ne déborde jamais dans la compassion ou dans le pathétique. La force du pouvoir de Frollo, custode de Notre-Dame, s’exerce à travers une gestuelle simple, s’imposant seulement grâce à la présence théâtrale de son interprète. L’atmosphère plus intériorisée transmise par les danseurs principaux contraste avec les scènes de groupe, très animées, imposantes, à partir du premier tableau du ballet La Fête des Fous.

Ballet de l’Opéra national de Paris, Notre-Dame de Paris-ph.Jonathan Kellerman
Un vrai moment lyrique qui constitue l’âme du ballet est le pas de deux du deuxième acte entre Esmeralda et Quasimodo. Roland Petit adopte un langage plus classique qui valorise surtout les qualités d’Amandine Albisson.
Soixante ans après sa création, Notre-Dame de Paris nous interpelle sur la modernité de son style, apparaissant parfois loin des évolutions esthétiques au fil du temps. Les représentations porsuivent jusuq’au 31 décembre à l’Opéra Bastille.
Opéra Bastille, 9 décembre 2025
Antonella Poli