L’Oiseau de feu-Le Sacre du Printemps

Chorégraphie : Thierry Malandain-Martin Harriague

Distribution : CCN Malandain Ballet Biarritz

Musiques : Stravinsky

L'Oiseau de feux-ph.Olivier Houeix

La musique d’Igor Stravinsky a été le dénominateur commun de la soirée du 11 Septembre dernier au festival Le Temps d’aimer à Biarritz : à l’affiche de la Gare du Midi, deux œuvres majeures du répertoire des Ballets Russes, L’Oiseau de Feu et le Sacre du Printemps récréées respectivement par Thierry Malandain et Martin Harriague, avec les danseurs du CCN Malandain Ballet Biarritz.

Les deux chorégraphes se sont confrontés de manière différente aux opus du compositeur russe tout en s’inspirant des arguments originaux des premières versions de ces deux célèbres ballets.

De son côté, Thierry Malandain, dont la sensibilité musicale est remarquable, imagine une chorégraphie sobre et harmonieuse qui contraste avec la musique percutante de Stravinsky.

En fait, il suit le rythme mais son langage néoclassique est accentué, restant très fidèle à des lignes épurées, géométriques, qui créent une atmosphère apaisée et solaire. Cela reste constant tout au long du ballet, soit dans les soli de l’Oiseau de feu magistralement interprétés par Hugo Layer, soit dans les scènes d’ensemble où tous les danseurs sont au rendez-vous. Revenons justement à l’interprète principal.

Depuis huit ans dans la compagnie et déjà remarqué lors de son premier rôle dans La Pastorale, il émerveille le public par son allure. Certes les séquences que lui a réservées Thierry Malandain, très techniques et afférentes au vocabulaire de la danse classique, le mettent en valeur. La précision de son exécution dégage une lumière particulière qui le fait briller plus encore, renforcée par l’éclat de son costume rouge-doré. De par la légèreté et la pureté de sa silhouette, il devient une créature spirituelle dans la ligne du propos du ballet : « on retiendra que les oiseaux symbolisent ce qui relie le ciel et la terre, voire que le phénix se décomposant pour renaître personnifie dans la religion chrétienne l’immortalité de l’âme et la résurrection du Christ » (Thierry Malandain, Revue Malandain Ballet Biarritz, n°90, 2021).

C’est ainsi que, dès son apparition sur scène, l’esprit de la pièce s’adoucit tant dans les scènes de groupes, plus terriennes au début de la pièce, que dans les pas de deux successifs comme ceux de Claire et François, les deux autres personnages principaux interprétés par Claire Lonchampt et Mickaël Conte. Au fil du ballet, grâce aussi au changement de la couleur des costumes des danseurs, des tuniques longues passant du noir au bleu pâle, la chorégraphie atteint son but. Le groupe des artistes chorégraphiques sur scène crée un ensemble éthéré où leurs mouvements précis, exécutés à l’unisson, mettent en relief l’unité et le haut niveau du Malandain Ballet Biarritz.

Quant à Martin Harriague, récréer le Sacre du Printemps n’est pas une affaire simple compte tenu de la renommée des chorégraphes qui l’ont précédé, comme par exemple Nijinsky, Béjart ou Pina Bausch).

Il reste fidèle à la structure originaire de la première version, celle de Nijinsky, et capte la puissance de la musique de Stravinsky en y adaptant son propre langage chorégraphique. Ces deux sources d’inspiration sont évidentes dès le premier tableau. En fait, la pièce s’ouvre avec un artiste au piano qui joue les première notes du Sacre ; une figure ancestrale est là pour pousser les interprètes à entrer sur scène en sortant, un par un, de l’intérieur de l’instrument. La musique accélère avec ses pulsations très rythmées et les danseurs suivent en groupe. Une bonne dynamique de groupe se développe grâce au juste niveau d’énergie dégagée par leur gestuelle. L’aspect rituel, caractérisé par la présence de danses, circulaires reste intact.

En revanche, Martin Harriague accorde de l’importance à une figure patriarcale qui représente à la fois la créature unificatrice et le père fragilisé par la virulence des hommes. La scène du sacrifice de l’élue est conçue avec force et soumet la danseuse Patricia Velasquez à une cruelle épreuve : elle devient un objet, jeté en l’air de nombreuses fois, balancé, suspendu ; puis le sacrifice s’accomplit par l’ascension au ciel de ce corps féminin inerte et exsangue.

Antonella Poli

 

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