Le Moulin du Diable

Chorégraphie : Fouad Boussouf

Distribution : Cie Massala

Le Moulin du Diable-ph.Sylvaine Lefeuvre

En s’inspirant de la pensée issue de l’ouvrage Accélération. Une critique sociale du temps de Artmut Rosa, Fouad Boussouf a présenté sa dernière création, Le Moulin du Diable.

Le livre critique la notion du temps contemporaine. On n’est plus confronté à un temps naturel marqué par exemple par la succession des marées ou bien par les cloches d’une église ou le chant récurent du muézin. Aujourd’hui, une vision du temps « normatif » nous impose de devoir remplir chaque minute de notre journée et cela à partir du plus jeune âge.

L’organisation de notre temps est rigoureusement soumise aux expressions : il faut faire, il faut aller. Et notre corps, que devient-il face à ces nouveaux impératifs ?

Bien sûr, sans s’en apercevoir, il se contraint et par voie de conséquence même nos capacités d’analyse et de réflexions sont assujetties à ces nouvelles dynamiques, ce qui fait que nous perdons la capacité de saisir pleinement chaque instant de notre vie.

C’est à partir de ces réflexions que Fouad Boussouf conçoit cette nouvelle pièce.

Depuis le début, les mouvements des danseurs sont saccadés et robotiques, surtout dans les bras ; ils semblent représenter un corps qui a perdu toute liberté pour s’étaler, pour s’allonger et pour prendre pleine conscience du monde. Les protagonistes tournent souvent en cercle comme pour suivre un chemin déjà marqué.

Tout cela dans la première partie. La suivante est touchante, de belles lumières et de grands cercles aux tonalités cuivrées descendent du plafond et constituent une mise en scène symbolique.

Sont-ce des pendules ou des horloges sans aiguilles qui finalement ne sont pas obligées de marquer le temps ? Une atmosphère d’apaisement envahit la scène, la sensation de l’espace et le sentiment de soi retrouvent leur dimension. C’est un très beau passage, où le public retrouve une sérénité et un calme qui manquaient auparavant. C’est finalement une sorte de victoire, la représentation de comment l’on peut se réapproprier son propre temps et son propre corps à l’encontre de toute vitesse.

Le Moulin du Diable est une belle création qui montre surtout le bon travail de recherche mené par Fouad Boussouf sur un sujet qui n’est pas si simple. Un aspect seulement nous laisse perplexes : pourquoi terminer la pièce avec une danse qui semble avoir perdu l’atmosphère et les conquêtes de la deuxième partie? La réponse revient à Fouad Boussouf qui aura « le temps » d’y réfléchir jusqu’aux prochaines représentations : le 19 novembre dans le cadre du festival Kalypso à Créteil (94), le 21 novembre à l’occasion du Concours Reconnaissance à Grenoble (38), le 26 Novembre au Théâtre Jacques Brel de Fontenay-sous-Bois (94), le 11 Décembre au Théâtre André Malraux de Chevilly-Larue (94) et le 22 janvier 2016 au Prisme d’Elancourt (78).

Théâtre Jean Vilar, Vitry-sur -Seine, 6/11/2015

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