Siguifin

Le Festival Suresnes Cités Danse célèbre cette année ses 30 ans, une étape importante pour cette manifestation dirigée par Olivier Meyer qui souligne dans une interview : « En 30 ans d’existence, le festival Suresnes Cités Danse a largement contribué à une évolution considérable de la danse hip hop, sur tous les plans : artistique, public et médiatique. Les productions se sont multipliées comme la diffusion, en France et à l’étranger, de ces spectacles issus du mouvement hip hop…Je suis fier d’avoir, au cours de ces 30 années, provoqué des rencontres artistiques et humaines fécondes, d’avoir fait de ce Théâtre une maison si attentive, bienveillante, exigeante et hospitalière. Une maison qui est devenue pour les artistes, danseurs et chorégraphes issus du mouvement hip hop, un véritable tremplin pour la reconnaissance de leur talent et pour la diffusion de leurs spectacles ».

Olivier Meyer, Directeur de Suresnes Cités Danse

Effectivement, les chorégraphes contemporains qui se sont succédés pendant ces trente ans ont été nombreux : Blanca Li, José Montalvo, Emanuel Gat, Jean-Claude Gallotta, Laura Scozzi, Régis Obadia, Dominique Rebaud et plus récemment Angelin Preljocaj, Pierre Rigal, Andrew Skeels, Kader Attou, Mourad Merzouki, Farid Berki, Sébastien Lefrançois, Amala Dianor, Jann Gallois, Ousmane Sy…Ils ont évolué et ont tous contribué à faire évoluer la danse hip-hop.

Amala Dianor a présenté le 15 et 16 Janvier dernier sa dernière création Siguifin. Le chorégraphe a un rapport très étroit avec le Festival : il y a exactement vingt ans qu’il dansait pour la première fois sur la scène du théâtre Jean Vilar de Suresnes : « Suresnes est le point de départ de ma carrière. Quand je suis venu au Théâtre Jean Vilar pour la première fois, je venais juste de sortir de ma formation au CNDC d’Angers. À l’époque, je ne connaissais pas du tout le monde de la danse contemporaine, je ne connaissais que le hip hop. J’ai été pris dans Play Back de Régis Obadia, qui s’est joué lors du festival Suresnes cités danse : c’était mon premier spectacle en tant que professionnel… Dès lors, Olivier Meyer m’a fait confiance et m’a poussé à participer à des rencontres et à devenir chorégraphe. C’est encore lui qui m’a commandé Nona, ma première chorégraphie ».

Dès lors, Amala Dianor a mûri en montrant tout son talent de chorégraphe. Siguifin est né de sa collaboration avec les chorégraphes Alioune Diagne du Sénégal, Ladji Koné du Burkina Faso et Naomi Fall du Mali. La pièce, d’une heure, se construit à travers différents tableaux où les neuf danseuses/danseurs s’engagent avec générosité, alternant entre une danse qui puise dans la tradition culturelle africaine et le hip-hop.

Ils se présentent au public alignés en groupe, dos pliés, marquant avec leurs pieds un rythme quaternaire en avançant sur la scène. Leurs corps sont orientés vers le sol. Le chant d’une des interprètes qui se dégage des autres adoucît et enrichi la marche très uniforme et bien carrée des danseurs, qui retrouvent leur verticalité. Mais pas pour longtemps. En fait, des séquences où les artistes montrent leurs qualités et leur maîtrise du style hip-hop se succèdent : évolutions au sol, cabrioles mais pas seulement.

: Siguifin-ph.Dan Aucante

: ph.Dan Aucante

Leur style est capable aussi de produire des images sculpturales et plus esthétiques, des formes et de nouvelles images des corps montrant l’évolution de la vision du hip pop. L’idée de combat se manifeste quand des danseurs s’affrontent corps à corps en nous rappelant les danses guerrières tribales et en nous en donnant quelques esquisses. Suivent des moments de calme où l’énergie déployée auparavant se transforme en mouvements presque immobiles, suscitant le rapprochement des danseurs qui retrouvent leur unité.

Dans le final, les mots paix et réconciliation, presque magiques à l’ère actuelle, prononcés par un des danseurs, nous rappellent la signification du titre de la pièce Siguifin, qui signifie être magique en bambara, la langue de l’ethnie principale du Mali. C’est l’esprit de groupe, leur joie, qui sont à son origine et qui deviennent le moteur de cette chorégraphie.

Suresnes, Théâtre Jean Vilar, 16 Décembre 2022

Antonella Poli

Découvrez la tournée de Siguifin et retrouvez encore le travail d’Amala Dianor avec WO-MAN et Point Zero du mardi 25 au samedi 29 janvier au Théâtre des Abbesses dans le cadre du Festival Faits d’Hiver

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