La Fugue en question…

Chorégraphie : Béatrice Massin, Pierre Rigal

Distribution : Karine Dahouindji, Alizée Duvernois, Marion Jousseaume, Damien Sengulen, Anais Vignon

Musiques : Gwenael Drapeau, Julien Lepreux, Marin Marais, Georg Friedrich Handel, Jean-Sébastien Bach

ph.Johan Morin

L’Adami, partenaire des artistes interprètes, présente un projet visant à promouvoir la création artistique avec de jeunes danseurs au début de leur carrière. Après plusieurs auditions, cinq artistes (Karine Dahouindji, Alizée Duvernois, Marion Jousseaume, Damien Sengulen, Anais Vignon) ont été choisis et ont eu l’opportunité de travailler avec deux chorégraphes renommés, Béatrice Massin et Pierre Rigal qui ont travaillé parallèlement et séparément sans jamais se concerter pendant la période de création.

La Fugue en question…, titre de la création, a été présentée le 15 Septembre dernier dans le cadre du festival Le Temps d’aimer à Biarritz. 

Le thème sur lequel les deux chorégraphes se sont concentrés a été celui de la fugue, qui peut tout de suite nous évoquer la forme musicale du XVIIème siècle basée sur la technique contrapuntique ou tout simplement faire référence à un éloignement physique ou mental d’un certain contexte ou état d’âme.

Béatrice Massin et Pierre Rigal ont préféré ne pas se confronter directement à la structure rythmique et mélodique de la fugue classique pour apporter leur vision artistique personnelle. On pourrait dire qu’ils ont créé de « nouvelles formes de fugue » à partir de son origine.

En fait, c’est ainsi que Pierre Rigal livre sa vision : « Une fugue musicale est pour moi une sorte de paradoxe temporel. En effet, dans une fugue, la mélodie à venir se compose progressivement par accumulation de fragments mélodiques du passé. Dit autrement, reculer permet d’avancer. J’ai donc choisi de jouer mécaniquement avec cette apparente contradiction et cette tournure passionnante de l’esprit ».

Pour cette aventure, le chorégraphe choisit deux musiciens contemporains, Gwenaël Drapeau et Julien Lepreux, tous les deux bien loin de la tradition classique. Leurs musiques abstraites produisent des sons qui parfois évoquent ceux de l’orgue et créent des rythmes bien cadencés, assimilés aux voix des anciennes partitions. Après un début sur scène, où les danseurs immobiles semblent vouloir entrer en relation et s’imprégner de sonorités pas du tout mélodiques, toute la pièce se déroule à travers des jeux d’interactions parmi les interprètes.

Structures de groupe articulées, caractérisées par des changements de poids ou d’équilibres précaires rendent au public des images très écrites et géométriques. Ces qualités sont aperçues aussi dans les parties où les danseurs marchent ou courent, dessinant des motifs géométriques dans l’espace.

Dans ces mouvements, les danseurs peuvent ressembler à « des personnages qui se rencontrent peut-être pour la première fois, apprennent à se connaître, à inventer des signes et des langages. Embarqués les uns avec les autres, ils traversent une ville moderne, sonore et absurde. Ils peuvent s’y perdre et sans le savoir, revenir là où ils sont déjà passés. Et dans ce voyage collectif, une question s’impose vite à eux. Vaut-il mieux suivre le groupe et se fondre dans la masse ou plutôt s’extirper pour prendre ses distances avec les autres ? » , tel est le questionnement lancé par Pierre Rigal.

Le travail de Béatrice Massin, chorégraphe renommée pour son travail de réflexion et de réélaboration de la danse baroque, semble plus s’inscrire dans la tradition tout en restant fidèle aux musiques de GF Haendel et JS Bach. Interrogée pour connaître quelles seront ses influences pour ré-interpréter  la Fugue, elle affirme : « Travailler sur la Fugue pour moi ne peut être qu’un hommage aux plus grands compositeurs de la musique baroque mais aussi à d’autres compositeurs plus tardifs qui questionneront et joueront de la fugue. C’est donc au plus proche des principes d’écriture musicale de la Fugue que je vais décliner les fondements de l’écriture chorégraphique de la pièce ».

Néanmoins, elle aussi met en valeur le travail de groupe, mais de manière moins structurée que Pierre Rigal. Les danseurs sont plutôt menés à une sorte de méditation sur la musique,  surtout quand ils dansent en slow motion individuellement. On reconnait par moments certains ports de bras de marque baroque, mais la chorégraphe joue pendant toute la pièce la carte de la sobriété.

Les danseurs créent une atmosphère détendue et fluide qui se développe à travers leurs traversées du plateau suivant différentes directions. On aurait voulu voir quelques images plus virtuoses dont Béatrice Massin est capable, mais l’expérience avec ces jeunes danseurs la rend satisfaite car elle a travaillé « avec des interprètes qui avaient peu ce qui rend la chose plus fragile mais aussi peut-être encore plus pure ».

ph.Johan Morin

Effectivement, c’est l’impression que l’on reçoit à la fin d’un spectacle où l’on ressent tout l’engagement et l’attention donnés par ces jeunes danseurs pour rendre un travail de qualité.

Les prochaines représentations de la Fugue en question…seront :

22/09/18 – Moissac -Centre culturel 

10/10/18 – Aurillac -Théâtre d’Aurillac / Festival Les Eruptives  

08/11/18 Paris  – Chaillot – Théâtre national de la Danse 

13/11/18 Saint-Nazaire – Scène nationale / Festival Les Musica’les 

16/11/18 St-Et.-du-Rouvray – Le Rive Gauche 

24/11/18 Brive-la-Gaillarde  Les Treize Arches 

 13/12/18 – Toulouse – Théâtre des Mazades

Antonella Poli

Partager
Site internet créé par : Adveris