Allegria

Chorégraphie : Kader Attou

Distribution : Gaetan Alin, Khalil Chabouni, Jackson Ntcham, Mehdi Ouachek, Artem Orlov, Sulian Rios, Hugo de Vathaire, Maxime Vicente

Musiques : Régis Baillet – Diaphane

Allegria - ph.Mirabelwhite

Huit danseurs, une musique aux accents lyriques très rythmée qui fait voyager et une écriture ciselée sont les clés du succès d’Allegria, pièce de Kader Kattou, présentée au Théâtre National de la Danse Chaillot jusqu’au 5 décembre.

Le titre évoque un sentiment de joie, mais ce que l’on ressent va bien au- delà. On parle d’émigration, un thème chargé, dès le début quand symboliquement une valise lourde apparaît sur scène, seul élément de décor. Les danseurs s’interrogent, leur danse hip-hop raffinée transmet leurs états d’âme, elle nous parle. Envoutante et séduisante, la chorégraphie se développe avec une succession de duos et de trios explorant les rapports humains. Sans barrières, les danseurs s’interrogent, entrent en contact et explorent l’inconnu de l’autrui.  

Le hip-hop de Kader Kattou ouvre de nouvelles formes de mouvement : l’aspect acrobatique de ce style de danse s’enrichit de mouvements porteurs de messages humains, ce qui est captivant et permet de rester éblouis. Cela grâce aussi à l’interprétation très généreuse des danseurs qui ne lâchent rien, se donnent corps et âme. Ils transmettent avec ironie l’attitude de se conformer à ce qui nous est imposé quand ils entament une marche régulière interrompue par des développés latéraux.

Allegria – ph.Justine Jugnet

La pièce assume encore plus la dimension de comédie humaine quand les danseurs se retrouvent à danser dans un théâtre installé comme un cadre sur la scène de Chaillot. Ils représentent une communauté avec toutes leurs diversités de corps, d’ethnies, de personnalités. La musique devient encore plus puissante avec des sonorités inspirées des fugues de Johan Sebastian Bach.

Allegria dégage une poésie fragile, délicate et généreuse, notamment dans les dialogues instaurés dans les duos ou bien quand tous les danseurs sauf un sont allongés au sol et que le seul survivant exprime acrobatiquement sa souffrance. Un drapeau fluctuant et traversant toute la scène, qui engloutit les danseurs, symbolise le naufrage qui nous reconduit vers le thème qui avait ouvert la pièce. Un message de fraternité est lancé quand un homme sort soudainement de la valise et est accueilli avec bienveillance.  Dans le final, la marche des danseurs, comme des soldats,  sur la musique évoquant des sonorités de danses traditionnelles russes, résume ironiquement la complaisance aux régimes totalitaristes.

Le public est enthousiaste…bien que la pièce soit terminée, le refrain musical du final reprend et les spectateurs dansent en applaudissant les danseurs.

Théâtre National de la Danse Chaillot, 26 Novembre 2019

Antonella Poli

 

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